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Comment assassiner un centre-ville

Tragédie en deux actes. L’arme du crime : empoisonnement à petit feu par décisions d’urbanisme.


Acte 1 : Prendre une ville petite à moyenne, sur un territoire périurbain ou rural, sans réseau de transports en commun très fourni, fonctionnant principalement à pied dans le centre-ville et sinon en voiture. Commencer par laisser implanter des grandes surfaces commerciales en proche périphérie, généralement sur une zone auparavant réservée aux activités productives artisanales et industrielles. Par exemple, un hypermarché. Celui-ci présente des atouts indéniables par rapport aux commerces du centre-ville :

  • Plus de choix en un seul endroit

  • Moins cher grâce à un foncier meilleur marché, un bâtiment plus simple et surtout les économies d’échelle de la grande distribution

  • Facile d’accès, avec un stationnement abondant

Des artisans sont présents dans l’hypermarché : boulanger, boucher, poissonnier, fromager, traiteur… certes dans un décor moins charmant mais efficace. Un coin livres et papeterie est aussi proposé. De nouveaux emplois sont créés, à la fois par déplacement d’emplois du centre-ville, et parce que l’hypermarché draine une clientèle plus large et vient aussi prendre des emplois des petites villes avoisinantes. C’est en effet un jeu à somme nulle, le pouvoir d’achat des consommateurs locaux n’étant pas extensible. Rien ne se crée, rien ne se perd, tout se transforme. A ce stade, les commerces du centre-ville sont déjà touchés, mais pas encore coulés. Si possible, réduire les places de stationnement disponibles dans le centre, les rendre payantes, supprimer des places de livraison, en bref rendre la circulation impossible, sans pour autant développer des alternatives adaptées au territoire, afin d’augmenter l’asphyxie. Encourager les incivilités et la délinquance afin d’améliorer le résultat.


Acte 2 : porter l’estocade. Les flux générés par la locomotive que représente l’hypermarché, le foncier bon marché et le stationnement abondant attirent de nouveaux acteurs qu’un PLU permissif autorise à s’implanter : une enseigne de boulangerie franchisée proposant du pain pétri et cuit sur place, une boucherie, un fleuriste, parfois chacun dans leur boîte préfabriquée en bardage métallique isolée sur la nappe de parking, parfois intégrée dans une boîte plus grande sous la forme d’un pôle commerces/services. Cette ville en boîte(s) s’agrandit. Attiré par les flux générés par les commerces déjà présents, banque, assureur, agence immobilière, cabinet médical… ouvrent bientôt leurs portes. Restaurants voire cinéma multiplex arrivent alors pour parfaire l’ensemble.


A ce stade, le centre-ville est en soins palliatifs. Les anciens prennent leur retraite et les boutiques ne sont pas reprises, celles qui restent réduisent leurs horaires ou au contraire multiplient les initiatives, mais dans tous les cas peinent à survivre. On vient éventuellement installer des associations, entreprises ESS ou autres dans les locaux vacants, qui ont certainement leurs mérites mais ne peuvent à elles seules faire revivre le centre-ville. Que faire ? La nouvelle zone commerciale s’est développée dans le respect du droit, représente des dizaines ou centaines d’emplois, forcer les entreprises à déménager est peu réaliste et coûterait une fortune… L’affaire semble mal partie.

Alors, que faire ? Pour le savoir, lisez notre article « Comment ressusciter un centre-ville » à paraître demain jeudi 30 novembre.




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